Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/466

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ſations produites par la fréquence des entrées & des ſorties. Quand deux ou trois hommages eurent enfin coulé dans ces temples impurs, je m’aperçus de quelque conſiſtance ; Cardoville quoique le plus âgé fut le premier qui l’annonça ; une claque de toute la force de ſa main ſur l’un de mes tétons en fut la récompenſe. Saint-Florent ſuivit de près ; une de mes oreilles preſqu’arrachée fut le prix de mes peines. On ſe remit, & peu après on m’avertit de me préparer à être traitée comme je le méritais. Au fait de l’affreux langage de ces libertins, je vis bien que les vexations allaient fondre ſur moi. Les implorer dans l’état où ils venaient de ſe mettre l’un & l’autre n’aurait ſervi qu’à les enflammer davantage : ils me placerent donc, nue comme je l’étais, au milieu d’un cercle qu’ils formerent en s’aſſeyant tous quatre autour de moi. J’étais obligée de paſſer tour-à-tour devant chacun d’eux, & de recevoir de lui la pénitence qu’il lui plaiſait de m’ordonner ; les jeunes ne furent pas plus compatiſſans que les vieux, mais Cardoville ſur-tout ſe diſtingua par des rafinemens de taquineries dont Saint-Florent tout cruel qu’il était n’approcha qu’avec peine.

Un peu de repos ſuccéda à ces cruelles orgies ; on me laiſſa reſpirer quelques inſtans ; j’étais moulue, mais ce qui me ſurprit, ils guérirent mes plaies en moins de temps qu’ils n’en avaient mis