Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

supposait Justine, ne voulut accepter le don qu’on lui offrait que sous l’exacte condition que Justine recevrait, de son côté, pour cent mille francs de lettres-de-change, qu’il la contraignit de mettre dans sa poche. Vous garderez cette somme, lui dit Saint-Florent, elle est à vous, ma chère nièce ; c’est une bien faible récompense des grands services que vous m’avez rendus ; mais acceptez toujours cela, et croyez que je ne vous abandonnerai de ma vie.

On dîna : Justine tomba bientôt, malgré elle, dans des rêveries… dans des inquiétudes qui altérèrent la sérénité de ses traits ; Saint-Florent lui en demanda la raison ; sans s’expliquer davantage, elle voulut rendre l’argent. Monsieur, dit-elle à son oncle, je n’ai point mérité une telle marque de reconnaissance, et ma délicatesse ne me permet pas d’accepter un présent aussi considérable. Saint-Florent, plein d’esprit, ne manqua pas de raisons pour vaincre Justine, et l’argent, malgré elle, fut remis dans sa poche, sans que les craintes de cette intéressante fille parussent diminuer un instant. Pour les dissiper, ou se donner l’air de ne les pas voir, Saint-Florent pria sa chère nièce de lui raconter ses aven-