Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/20

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et d’intérêt, une peau douce et éblouissante, une taille souple et flexible, des formes arrondies et dessinées par les mains de l’Amour même, un organe enchanteur, la bouche charmante, et les plus beaux cheveux du monde : voilà l’esquisse, de cette cadette délicieuse, dont les graces enchanteresses et les traits délicats sont au-dessus de nos pinceaux ; que nos lecteurs se représentent tout ce que l’imagination peut créer de plus séduisant, et ils seront au-dessous de la réalité.

On leur avait donné vingt-quatre heures à l’une et à l’autre pour quitter l’abbaye ; Juliette voulut essuyer les pleurs de Justine ; voyant qu’elle n’y réussissait pas, elle se mit à la gronder au lieu de la consoler, elle lui reprocha sa sensibilité, elle lui dit avec une philosophie très-au-dessus de son âge, et qui prouvait en elle les plus singuliers efforts de la nature ; qu’il ne fallait s’affliger de rien dans ce monde-ci ; qu’il était possible de trouver en soi des sensations physiques d’une assez piquante volupté pour éteindre toutes les affections morales dont le choc pouvait être douloureux ; que ce procédé devenait d’autant plus essentiel à mettre en pratique, que la véritable sagesse consistait infiniment plus à