Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/240

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supposition s’accorde-t-elle avec la manière sublime et sûre dont nous la voyons parvenir ses à ses fins ? Ah ! si le meurtre n’était pas une des actions de l’homme qui remplisse le mieux ses intentions, permettrait-elle qu’il s’opérât ? l’homme ne serait-il pas impassible aux coups de l’homme. Imiter la nature peut-il donc nuire à la nature ? peut-elle s’offenser de voir l’homme faire à son semblable ce qu’elle lui fait elle-même tous les jours ? puisqu’il est démontré qu’elle ne peut se reproduire que par des destructions, n’est-ce pas agir d’après ses vues, que de les multiplier sans cesse ? n’est-ce pas lui être agréable, que de coopérer à ses plans ? Et sous ce rapport, l’homme qui se livrera le plus ardemment et le plus souvent au meurtre, ne sera-t-il pas celui qui la servira le mieux, puisqu’il deviendra celui qui remplira le plus énergiquement des desseins qu’elle manifeste à tous les instans ? La première et la plus belle qualité de la nature est le mouvement qui l’agite sans cesse ; mais ce mouvement n’est qu’une suite perpétuelle de crimes ; ce n’est que par des crimes qu’elle le conserve ; elle ne vit, elle ne s’entretient, elle ne se perpétue qu’à force de destructions ; l’être