Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/239

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minelles, ou toutes également innocentes[1]. Si elles sont criminelles, je puis l’être à leur exemple ; car la somme des passions et des intérêts d’une nation n’est que le résultat des intérêts et des passions particulières ; et il ne doit être permis à une nation de tout sacrifier à ses intérêts ou à ses passions, qu’autant qu’elle sera assez juste pour permettre que les individus qui la composent puissent, dans de pareils cas, faire des sacrifices égaux. Embrassons-nous la seconde branche de l’hypothèse, toutes ces actions sont-elles innocentes, que risquai-je alors de m’en souiller toutes les fois que mon plaisir ou mon intérêt l’exigeront ? et de quel œil regarderai-je l’individu qui osera les trouver criminelles ?

Eh ! non, non, Justine, la nature ne laisse pas dans nos mains la possibilité des crimes qui troubleraient son économie. Peut-il tomber sous le sens que le plus faible ait la puissance d’offenser le plus fort ? Que sommes-nous relativement à la nature ! peut-elle, en nous créant, avoir placé dans nous ce qui serait capable de lui nuire ? Cette imbécille

  1. Ce qui a été dit des loix tout-à-l’heure les fait rentrer dans cette hypothèse.