Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/100

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Là, nous observâmes, avec philosophie, l’état de l’homme, ferme dans ses principes, quand il vient de satisfaire sa passion. Un imbécille, obligé d’attendre, n’ayant pour perspective que l’objet de sa rage et de sa lubricité au milieu du silence et de l’horreur des tombeaux, eût infailliblement frémi ; notre scélérat, calme, s’occupe à rempaqueter les restes déchirés de sa fille. Il les replace dans le cercueil ; il demeure même quelques tems dans le caveau, sans que nous sachions ce qu’il y fait ; c’est alors que la Durand, qui pendant toute l’opération, n’avait cessé ou de se branler, ou de me branler moi-même, me propose de repousser la pierre du caveau, et d’engloutir cet homme avec sa victime… Non, dis-je, c’est un scélérat, et nous leur devons à tous, respect et protection. Cela est juste, me répondit-elle, mais au moins faisons lui bien peur, place-toi promptement au même lieu, et dans la même attitude ou il vient de mettre sa fille, que ce soit la première chose qu’il voye en remontant ; toutes ses idées se confondront, il y aura de quoi le rendre fou. Cette extravagance me parut trop singulière pour ne pas être exécutée.