Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/120

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de quitter la voiture à la petite ferme qui se trouvait au bas du rocher, offrant à sa racine un escalier de quatre cents marches, par lequel seul on parvenait à cette redoutable maison. Nous trouvâmes, au bas, une porte de fer, que le négociant ouvrit, et six pareilles dans la longueur de l’escalier, que notre patron ouvrit et referma de même. Durand, voyant la surprise se mêler sur mes traits, à l’agitation de la peur, me rassura, et dit aussi-tôt à Cordelli : Tu m’avais parfaitement indiqué l’endroit, et nos gens, à qui j’en ai laissé la description, pour nous y revenir chercher demain, si nous ne sommes pas à dix heures du matin avec eux, trouveront bien facilement cette retraite. Elle est connue de tout les environs, dit le négociant, d’un air à me calmer ; mais ta précaution, Durand, était inutile, je t’ai promis que cette nuit même, nous retournerions à la ville, et tu me connais assez pour être bien sûre que je ne te tromperai jamais. Il s’en fallait bien que nos deux jeunes filles fussent aussi tranquilles. Une sorte de pressentiment accompagne toujours le malheur, les infortunées l’éprouvaient dans toute sa force : elles étaient toutes les deux prêtes à