Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/179

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instrument si prodigieux, que, malgré l’extrême habitude que j’ai d’être enculée, il m’écorche chaque fois qu’il me sodomise… seule et unique façon dont il jouisse de moi. Voilà, ma chère amie, le physique singulier de l’homme dont je rafole, quoique je lui fasse cent infidélités par jour ; mais il me les permet ; il sait que je ne puis m’en passer ; et si je lui en tolère, de mon côté, en lui fournissant le gibier qu’il aime, il me permet, du sien, de foutre, si je veux, avec toute la terre. Aucune jalousie de part ni d’autre : c’est presque ce qu’on pourrait appeller une union morale. Moberti a l’esprit qui me plaît, c’est un désordre d’imagination… si piquant, un libertinage si atroce, une férocité si sauvage, un abandon de principes si prodigieux, un athéisme si profond, une corruption si complète, que tout cela me tourne la tête, et me fait idolâtrer cet homme à un point qui surpasse tout ce que les poëtes et les historiens ont pu, jusqu’à ce moment-ci, vous peindre de l’amour. Moberti a, comme tu l’imagines bien, plusieurs agentes dans Venise, qu’il place chez des gens très-riches, et qui, ne fréquentant que des personnes de cette caste, sont à