Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/212

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cru, que l’imagination humaine pût s’élever à cet incroyable degré de corruption et de perversité. Ce que j’ai vu faire là, est inimaginable ; on ne croira jamais que le libertinage puisse entraîner l’homme dans un tel gouffre d’horreurs et d’infamies : oh, comme il est dangereux quand il bande. Non, je puis le dire avec vérité, la bête la plus féroce et la plus sauvage n’atteignit jamais ces monstruosités. Le grand crédit dont nous jouissions, le silence, l’ordre, la subordination qui régnaient dans cet asile, l’extrême facilité que l’on y trouvait à la satisfaction de toutes les débauches, de quelque nature qu’elles pussent être ; tout encourageait l’homme timide, tout enthousiasmait l’homme entreprenant ; et les passions, sous quelques formes qu’elles se présentassent, quelque fût le genre des ames où elles s’éveillassent, étaient toujours sûres de s’alimenter, de se nourrir et de se satisfaire. C’est-là, mes amis, je le répète, oui, c’est-là qu’il faut suivre l’homme pour le bien connaître ; c’est dans le sein de la lubricité que son caractère, absolument à nu, fournit à-la-fois toutes les teintes nécessaires au philosophe qui veut les saisir ; et c’est