Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/311

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mais vous entendez, dites-vous, une voix secrette qui semble vous dire de résister ; vous me demandez si cette voix est celle de la nature ? Eh ! non, Juliette, non, non ; cette voix à laquelle il est inconcevable que vous puissiez vous tromper, n’est autre que celle du préjugé, auquel vous avez la faiblesse de laisser encore quelqu’empire, parce qu’il s’agit ici d’un genre de délit qui ne vous est pas aussi familier que ceux où vous vous livrez d’ordinaire, et qui cependant, n’est autre chose que celui du vol que vous aimez, et où vous vous livrez journellement ; vous prenez donc bien certainement ici, la voix du préjugé pour celle de la nature, tandis que celle-ci, bien différente, sans doute, ne vous conseille que de vous rendre heureuse, n’importe aux dépends de qui ; épurez-la donc cette voix, dégagez-la de tout ce qu’elle a d’hétérogène, vous l’entendrez dans toute sa pureté, et cessant de flotter désagréablement ainsi, vous agirez alors en paix, sans crainte de vous donner des remords, sans crainte d’outrager une nature que vous servez au contraire, en accomplissant le crime qu’elle vous indique par le desir quelle vous en donne.