Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/319

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le sauver ?… Ce soupçon injurieux, dit alors Noirceuil, est la récompense du bien que je veux vous faire, madame, et je vous en remercie… En vérité, repris-je avec chaleur, vous meriteriez, madame, que monsieur de Noirceuil vous abandonnât sur-le-champ ; comment osez-vous soupçonner ainsi le plus vertueux des hommes ? — Il met, aux soins qu’il veut me rendre, un prix qui me déshonore : j’idolâtre mon mari, je ne lui ai manqué de mes jours, et ce n’est pas, quand il est dans le malheur, que je comblerai son infortune, par un aussi sanglant outrage. — Cet outrage est imaginaire, jamais votre époux ne s’en doutera ; avec l’esprit que vous anoncez, je suis étonnée que vous teniez à ces chimères : ce ne sont point vos sentimens d’ailleurs, que desire monsieur de Noirceuil, ce ne sont que vos faveurs, et la lésion dès-lors doit vous paraître beaucoup moins sensible ; mais, je vais plus loin, cette lésion, dût-elle même exister, de quelle considération devient-elle, dès qu’il s’agit de sauver votre époux ? Il me reste donc à défendre monsieur de Noirceuil, sur le prix qu’il exige. Ah ! madame, vous connaissez bien peu l’esprit