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conservée, elle est encore assez heureuse pour te rapporter celui qu’on t’avait confisqué dans Venise. Oui, Juliette, continua cette chère amie, en remettant sur la table une liasse de papiers : voilà le fonds de tes quinze cents mille livres de rente que je te rends ; c’est tout ce que j’ai pu sauver ; jouis en paix, et ne m’accorde, pour reconnaissance, que la certitude de finir, avec toi, mes jours. Oh, mes amis, s’écrie Juliette, ivre de joie ! aura-t-il tort celui qui quelque jour écrira l’histoire de ma vie, s’il l’intitule : les prospérités du vice… Hâte-toi, Durand, hâte-toi de nous développer des faits aussi singuliers ; et convainc-toi bien que c’est moi qui te supplie de ne jamais nous quitter de tes jours.

Alors cette femme, à jamais célèbre, apprit à la société, le plus succintement qu’elle pût, qu’en promettant de livrer et d’exécuter tous ses secrets, on lui assurait qu’une autre femme serait exécutée à sa place ; l’exemple étant nécessaire pour Juliette, dont le conseil voulait les biens et le départ de peur d’imprudence : la feinte ayant parfaitement réussi, elle avait satisfait les inquisiteurs, et produit, dans Venise, une