Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/58

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matie, sur les bords du golfe de Venise, et lui assigna trois millions de revenu, la mit sous la protection des Vénitiens, qui lui accordèrent le titre de souveraine de son île, et la permission d’y faire tout ce qu’elle voudrait. Christine reléguée là depuis seize ans, en a maintenant quarante, et y jouit de tous les plaisirs que la plus extrême lubricité peut faire naître. Je ne vous en dirai pas davantage, voulant vous laisser tous les plaisirs de la surprise ; nous traverserons le golfe dans une felouque à elle, dont je puis disposer quand je veux. C’est un voyage de vingt-quatre heures ; décidez-vous.

Assurément nous le sommes, répondis-je ; je suis bien sûre que Clairwil ne me désavouera pas : notre voyage ayant pour but d’étudier les mœurs et de voir des choses extraordinaires, l’objet serait manqué, si, pouvant observer ce que tu nous proposes, nous nous y refusions par tiédeur. — Oh ! sacre-dieu, dit mon amie, comme nous allons foutre dans l’île de Christine… Jamais, dit Durand, jamais vous n’aurez eu tant de plaisir… Quoi ! dis-je, elle a donc là ?… Eh ! non, non ; je ne veux rien dire, répondit la Durand, il faut que vous en ayez toute