Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/83

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nous ne commençons que pour finir ; chaque instant nous mène à ce dernier terme ; tout prouve que c’est l’unique fin de la nature : or, je demande comment il est possible de douter, d’après l’expérience acquise, que la mort, en tant que besoin de la nature, ne doive pas devenir, de ce moment-là seul, une volupté, puisque nous avons sous nos yeux la preuve convainquante que tous les besoins de la vie, ne sont que des plaisirs : il y a donc du plaisir à mourir ; il est donc possible de concevoir qu’avec de la réflexion et de la philosophie, on puisse changer en idées très-voluptueuses toutes les ridicules frayeurs de la mort, et qu’on puisse même y penser et l’attendre en s’excitant aux plaisirs des sens. Ce systême, absolument nouveau, et qui n’est pas sans vraisemblance, dis-je à mon amie, serait dangereux à mettre au jour. Que de gens uniquement contenus par la crainte de la mort, et qui, délivrés de cette frayeur, se livreraient à tout, de sang froid… Mais, dit ma délicieuse amie, je suis bien loin de chercher à éloigner du crime ; je ne travaille au contraire qu’à dégager sa route de toutes les entraves qu’y met la sottise ; le crime est mon élé-