Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/122

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c’est pour leur donner occasion de mieux développer leur esprit. Nous te rendons assez de justice, dit Ambroise, pour être bien sûrs que tu ne joues ici que le rôle d’un controversiste, et que les sentimens que j’ai mis au jour sont autant dans ton ame que dans la mienne. J’espère qu’aucun de vous n’en doute, dit Severino, peut-être même les porté-je plus loin ; j’en suis au point de desirer un crime assez étendu pour satisfaire amplement toutes mes passions, et dans la classe de ceux que je connais, à peine trouvé-je à ces passions qui me dévorent un aliment qui les appaise ; tout est au-dessous de mes pensées, et rien ne satisfait mes desirs. Il y a des siècles que je suis au même point, dit Jérôme, et plus de vingt ans que je ne bande qu’à l’idée d’un crime supérieur à tout ce que l’homme peut faire dans le monde, et malheureusement je ne le trouve point, tout ce que nous faisons ici n’est que l’image de ce que nous voudrions pouvoir faire, et l’impossibilité d’outrager la nature est, selon moi, le plus grand supplice de l’homme. Vous bandez, Jérome, dit Severino ? — Pas un mot, mes amis, voyez mon vit, comme il est flasque. Ah ! que je bande ou que je ne bande pas, j’ai toujours le même