Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/124

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remue l’ame avec autant d’empire ? rien qui, comme le crime, chatouille les sens avec plus d’énergie ! Oh ! mes amis, que n’en pouvons-nous commettre à tous les instans du jour ! Patience, patience, dit Severino en continuant son personnage de controversite, il viendra un tems où la religion tonnera dans vos cœurs, où les idées de l’Être-Suprême et du culte qui lui est dû, absorbant toutes les illusions du libertinage, vous contraindront à rendre à ce Dieu saint tous les mouvemens d’un cœur dont vous avez laissé le crime s’emparer.

Mon ami, dit Ambroise, la religion n’a d’empire que sur l’esprit de ceux qui ne peuvent rien expliquer sans elle, c’est le nec plus ultra de l’ignorance ; mais, à nos yeux philosophes, la religion n’est qu’une fable absurde, uniquement faite pour nos mépris ; et quelles notions nous donne-t-elle, en effet, cette religion sublime ? je voudrais bien qu’on me l’expliquât ; plus on l’examine, et plus l’on voit que ses chimères théologiques ne sont propres qu’à embrouiller toutes nos idées ; métamorphosant tout en mystères, cette fantastique religion nous donne, pour cause de ce que nous ne comprenons pas, quelque