Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/134

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par une fenêtre fort haute, environnée d’un triple grillage. Les cellules n’étaient point fermées ; chaque fille pouvait passer ou dans la salle, ou chez sa compagne, à l’heure qu’elle voulait ; mais elle ne pouvait pas non plus s’enfermer dans sa chambre. Le nom des filles était gravé au-dessus de chaque porte ; ce fut par ce moyen que Justine trouva Omphale ; et le premier mouvement qui lui échappa, fut de se jeter, en larmes, dans le sein de cette charmante fille, dont l’air timide et doux lui faisait croire, avec raison, que l’ame sensible pourrait la comprendre.

Oh ! chère amie, lui dit-elle en s’asseyant sur son lit, je ne puis revenir ni des exécrations que j’ai souffertes, ni de celles dont on m’a rendu témoin. Si quelquefois, hélas ! mon imagination s’égarait sur les plaisirs de la jouissance, je les croyais purs comme le Dieu qui les inspire aux hommes : donnés par lui pour leur servir de consolation, je les supposais nés de l’amour et de la délicatesse ; j’étais bien loin de croire, qu’à l’exemple des bêtes féroces, ils ne pussent jouir qu’en faisant souffrir leurs compagnes. O grand Dieu ! continuait-elle, en poussant un profond soupir, il est donc bien certain maintenant qu’aucun