Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tempérament plus vigoureux que Bandole ; quoiqu’âgé de quarante ans, il foutait encore régulièrement ses quatre coups par jour, et dans sa jeunesse, il avait été jusqu’à dix. Grand, mince, d’un tempérament bilieux et sec, possédant un vit noir et mutin de neuf pouces de long sur six de tour, velu sur tout son corps comme un ours ; Bandole, tel que nous venons de l’esquisser, n’aimait les femmes que pour en jouir ; en était-il rassasié, il était impossible de les mépriser davantage. Ce qu’il y avait de très-singulier, c’est qu’il ne s’en servait jamais que pour leur faire des enfans, et que jamais il ne manquait son coup ; mais, c’est l’usage qu’il faisait de ce fruit qui sans doute était plus extraordinaire encore : on l’élevait jusqu’à dix-huit mois ; les avait-il atteint, le funeste étang où nous venons de le voir plonger un de ces fruits, devenait le cercueil universel de tous.

Pour la satisfaction de cette bizarre manie, Bandole avait trente filles enfermées dans son château, de l’âge de dix-huit à vingt-cinq ans, et toutes de la plus grande beauté ; quatre vieilles femmes étaient chargées de la tenue de ce sérail ; une cuisinière et deux filles de cuisine achevaient de composer toute la mai-