Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/182

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une heure avant le souper, la victime paraît, couronnée de cyprès ; son genre de supplice se met aux voix ; le secrétaire lit la liste d’une certaine quantité de tourmens ; ceux qui paraissent flatter davantage se discutent ; le choix fait, la victime est placée sur un piédestal, en face de la table où l’on soupe, et si-tôt après le repas, le supplice commence ; il dure quelquefois jusqu’au jour. Les filles de garde n’assistent point à ces orgies ; trois des six femmes choisies les remplacent, et les infamies se portent à leur comble. Mais qu’ai-je besoin d’appuyer sur ces détails ? tes yeux, ô ma douce amie ! ne t’en convaincront que trop tôt. Juste ciel ! s’écria Justine, le meurtre, le plus exécrable des crimes, serait-il donc pour eux comme pour ce célèbre maréchal de Retz[1], une sorte de jouissance, dont la

  1. Voyez dans l’histoire de Bretagne par dom Lobineau, les cruelles voluptés où cet homme étonnant se livrait avec des enfans de l’un et de l’autre sexe, dans son château de Machecou. Le duc de Bretagne, plus envieux de ses biens qu’il confisqua, que jaloux de venger l’immoralité de ce seigneur rempli d’esprit et de talens, lui fit faire son procès à Rennes, où il périt sur un échafaut, pour avoir eu le malheur d’être riche, et singulièrement organisé de la nature.