Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/183

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cruauté irritant à-la-fois leurs nerfs et leur perfide imagination, plongea leurs sens dans une ivresse plus vive ? Accoutumés à ne jouir que par la douleur, à ne se délecter que par des tourmens et par des supplices, serait-il donc possible qu’ils s’égarassent au point de croire qu’en redoublant, qu’en améliorant la première cause du délire, on dût inévitablement le rendre plus parfait, et qu’alors, sans principes comme sans foi, sans mœurs comme sans vertu, les coquins, abusant du malheur où nous plongent leurs premiers forfaits, se satisfissent par des seconds qui nous coûtassent la vie ? N’en doutes pas, répondit Omphale ; ils nous égorgent, ils nous supplicient, parce que le crime les irrite ; écoute-les raisonner là-dessus, et tu verras avec quel art ils érigent toutes leurs turpitudes en systêmes. — Et ces réformes se font-elles souvent ? — Il périt un sujet ici, soit de l’une ou de l’autre classe, régulièrement tous les quinze jours. Rien, au surplus, ne légitime cette réforme ; l’âge, le changement des traits, rien n’y fait ; le caprice est leur seule règle ; ils réformeront aujourd’hui celle qu’ils ont hier le plus caressé, et garderont vingt ans celle dont ils paraissent le plus rassasiés. J’en suis la preuve, ma