Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/237

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agneaux dévorés par les loups ; le fort qui sacrifie le faible, le faible la victime du fort, voilà la nature, voilà ses vues, voilà ses plans ; une action et une réaction perpétuelle, une foule de vices et de vertus, un parfait équilibre, en un mot, résultant de l’égalité du bien et du mal sur la terre, équilibre essentiel au maintien des astres, à la végétation, et sans lequel tout serait à l’instant détruit. O Justine ! elle serait bien étonnée cette nature, si elle pouvait un instant raisonner avec nous, et que nous lui disions que ces crimes qui la servent, que ces forfaits qu’elle exige et qu’elle nous inspire, sont punis par des loix, qu’on nous assure être l’image des siennes. Imbécille, répondrait-elle à celui qui lui parlerait ainsi, engendre, calomnie, détruis, fouts en cul, en con, vole, pille, viole, incendie, martyrise, assassine ton père, ta mère, tes enfans, commets sans peur tous les crimes que bon te semblera, ces prétendues infamies me plaisent, elles sont nécessaires à mes vues sur toi, et je les veux, puisque je te les inspire ; tu ne pourrais pas les commettre, si elles m’outrageaient ; il t’appartient bien de régler ce qui m’irrite ou ce qui me délecte ! apprends que tu n’as rien dans toi qui ne