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tems de la réflexion. Je ne crains pour vous qu’une chose, c’est l’amour : quand on lui ressemble aussi bien, il est facile de l’imiter. Vous êtes un homme perdu, si vous vous amusez à la métaphysique. Souvenez-vous qu’une femme n’est pas faite pour être aimée ; ce n’est pas avec autant de défauts qu’elle aurait le droit d’y prétendre : uniquement créée pour nos plaisirs, ce n’est que pour y satisfaire qu’elle respire. Voilà le seul rapport sous lequel vous deviez envisager votre sœur : foutez-là donc, je vous y exhorte, et vous proteste de vous aider en tout ce qui dépendra de moi : plus de retenue, plus d’enfance ; la vertu perd un joli homme ; le vice seul l’embellit et lui sert.

Sulpice, enhardi par mes conseils, me promit de travailler sérieusement ; dès le même jour, je lui en fis naître l’occasion ; j’appris bientôt que rien n’avait été plus heureux que ses premières tentatives, mais que, toujours timide, il n’en avait pas su profiter. On l’aimait, c’est tout ce qu’il avait su, et quelques baisers sur la bouche en avaient été l’heureux sceau. Je grondai vivement Sulpice de son impardonnable nonchalance. Mon ami, me dit-il, j’irais plus vîte avec un individu de