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cieuse des jouissances. — Il y a bien peu de délicatesse à cela. — Et que fait la délicatesse en amour ? ajoute-t-elle un chatouillement de plus au plaisir ? Non, sans doute : au contraire elle en diminue les sensations, en contraignant l’homme à des sacrifices matériels en faveur du moral ; sacrifices toujours faits aux dépens de sa volupté. La délicatesse est la chimère de l’amour ; la jouissance en est l’élément. Tous les amans délicats sont de mauvais fouteurs, Justine ; ils croyent dédommager une femme, en belles paroles, de ce dont ils la privent en effet. Pour moi, je l’avoue, si j’étais de votre sexe, j’aimerais mieux être molestée et bien foutue, que de m’entendre dire tous les jours des choses délicieuses par un bande-à-l’aise[1]. Allons, Justine, prends ton parti ; le rôle du plus faible est de céder : si les circonstances viennent à changer, peut-être deviendras-tu la maîtresse à ton tour ; alors je t’obéirai. Bandole sortit, et laissa la pauvre Justine dans l’attente du plus affreux outrage que sa pudeur put redouter. Elle y réfléchissait, ap-

  1. Ceci n’est que l’esquisse des principes qui se développeront plus bas.