Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/43

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M’aimer, répondit Bandole, je serais au désespoir qu’une femme s’en avisât : l’homme qui veut jouir délicieusement ne recherchera jamais le cœur d’une femme ; avec de tels procédés, on ne deviendrait que son esclave et par conséquent très-malheureux. Une femme n’est vraiment délicieuse à foutre que quand elle vous déteste cordialement ; et l’homme qui voudra connaître tout le piquant d’une jouissance, ne doit rien négliger pour imprimer à la femme qu’il fout le plus de motifs de haine qu’il lui sera possible. Crois-tu que les Asiatiques, si experts en volupté, ne savent pas bien ce qu’ils font, quand ils enferment leurs femmes ? N’imagines pas, Justine, que la jalousie influence en rien leur manière d’agir à cet égard. Serait-il présumable qu’un homme qui a cinq ou six femmes puisse les aimer toutes, au point d’en être jaloux : ce n’est point pour cela qu’il les enferme ; le seul motif qui le détermine à cette clôture, est qu’il y gagne par-là le moyen de les vexer plus à l’aise, desir qui naît en lui de la certitude où il est qu’une femme aigrie, tourmentée, qu’une femme qui déteste l’homme qui doit avoir à faire avec elle, devient nécessairement pour lui la plus déli-