Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/52

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tinence et les mœurs : on y va, poursuit la jeune fille, une fois par an en pèlerinage, près d’une vierge miraculeuse dont les gens pieux obtiennent tout ce qu’ils veulent ; allez-y, mademoiselle, allez-y, vous n’en reviendrez pas sans vous sentir meilleure. Singulièrement, émue de cette réponse, Justine conçoit aussitôt le desir le plus véhément d’aller implorer quelques secours aux pieds de cette sainte mère de Dieu. Je la verrai, s’écrie-t-elle avec componction, je l’adorerai celle à qui l’Être-Suprême accorda la grâce d’enfanter un Dieu ; je me prosternerai aux pieds de cette source ; de pureté, de virginité, de candeur et de modestie. Ah ! volons ; chaque instant de retard est un crime dont ma religion s’effarouche.

Justine voulait que son institutrice la suivit ; elle l’en prie, lui offre même de l’argent, mais sans rien obtenir : la jeune fille objecte des occupations qui lui laissent à peine le tems, de vaquer à ses devoirs. Eh bien ! dit Justine, j’irai donc seule, indiquez-moi la route ; on la lui montre ; on l’assure qu’elle a plus de tems qu’il ne lui en faut pour arriver de bonne-heure ; on lui certifie que le supérieur de cette maison, le plus respectable et le plus saint