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frère, et ne savais où porter mes pas pour les rejoindre ; vous m’instruisez, que ne vous dois-je pas ? Partons, monsieur, et partons seuls, puisqu’elle l’exige. Ici j’arrêtai quelques momens la précipitation de ce jeune homme, pour lui faire observer qu’a près l’acharnement du frère d’Héloïse ce ne devait pas être à Trente qu’il devait ramener cette belle fille ; prenez avec vous le plus d’argent que vous pourrez, lui dis-je ; sortez du territoire de cette ville, et liez-vous pour jamais à celle que vous aimez ; réfléchissez-y bien, monsieur ; mais une conduite contraire vous la fait perdre pour toujours. Alberoni, pénétré de mes raisonnemens, me remercie, et ouvrant son cabinet avec précipitation, il prend sur lui tout ce qu’il a d’or et de bijoux ; partons maintenant, me dit-il, j’ai de quoi la faire vivre un an avec éclat, dans telle ville d’Allemagne ou d’Italie que ce puisse être, et pendant l’intervalle d’un an on peut arranger bien des affaires. Content de cette sage résolution, je l’approuve, je fais mettre ma voiture à l’auberge, malgré les instances d’Alberoni qui voulait absolument qu’elle restât chez lui. Nous volons.

Héloïse n’avait pas bougé ; homme impru-