Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/26

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sage précaution, à cause de la différence des monnaies, d’échanger mon numéraire contre du papier sur la Sicile. Le banquier qui m’escompta me fit plus de politesses que n’en reçoivent les Siciliens, quand ils se présentent pour le même objet, chez des banquiers de Paris ; et c’est une justice que je dois rendre à la parfaite urbanité de tous les négocians étrangers à qui j’ai eu affaire : une lettre-de-change sur eux devient une lettre de recommandation ; et les offres les plus sincères… les plus multipliées accompagnent toujours au moral les obligations que leurs correspondans prennent au matériel avec eux.

Je témoignai à mon banquier le desir que j’avais d’acheter une terre seigneuriale avec les fonds considérables dont je me trouvais possesseur. Le régime féodal est ici dans toute sa vigueur, dis-je à ce brave homme ; cela seul me détermine à m’y établir ; je veux à-la-fois commander aux hommes et cultiver la terre, dominer également sur mon champ et sur mes vassaux. En ce cas, vous ne pouvez être mieux qu’en Sicile, me dit mon correspondant ; il est telle terre ici où le seigneur a droit de vie et de mort sur ses habitans. Voilà celle qu’il me faut, répondis-je ; et pour ne