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De toutes ces maisons, dans lesquelles on affectait de me recevoir avec bienveillance, celle du cavalier Rocupero me fixa plus particulièrement. Ce vieux noble et sa femme pouvaient à-peu-près former un siècle à eux deux ; la médiocrité de leur fortune leur faisait élever et nourrir avec une beaucoup trop grande économie, les trois plus belles filles qu’eût jamais créé la nature. La première se nommait Camille ; elle avait vingt ans, brune, la peau d’un blanc à éblouir, les yeux les plus expressifs, la bouche la plus agréable, et la taille d’Hébé même, La seconde, plus intéressante, mais moins belle, n’avait que dix-huit ans ; ses cheveux étaient châtains ; ses grands yeux bleux, pleins de langueur, respiraient à-la-fois l’amour et la volupté ; sa taille, ronde et bien remplie, promettait la meilleure jouissance ; on la nommait Véronique ; et, certes, je l’eus préféré, non pas uniquement à Camille, mais à toute la terre, sans les attraits célestes de Laurence, qui, quoi qu’à peine âgée de quinze ans, surpassait en beautés, et ses sœurs, et les plus belles personnes de toute la Sicile.

À peine fus-je introduit chez ce bon gentilhomme, je résolus d’y porter à-la-fois le