Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/63

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lente action ! répondrons-nous à la bêtise environnée des préjugés gothiques de la morale et de la vertu ; nous avons servi la nature, en lui aiguisant un des ressorts par lesquels elle opère le mal nécessaire dont elle est toujours affamée.

Nous passâmes encore trois mois à ma terre, noyés dans la luxure et dans la débauche, lorsque des raisons de prudence nous contraignirent enfin de reparaître où nous plaçait notre devoir, La première aventure que me valut mon poste de confesseur, en revenant de-là, fut celle d’une dévote de trente ans, encore assez jolie ; elle était au lit de la mort lorsqu’elle m’envoya chercher. Mon père, me dit-elle, il est tems que je répare la plus odieuse des injustices. Regardez le million en or que voilà déposé sur cette table, et fixez cette jeune fille, poursuivit-elle en me montrant une enfant de douze ans, d’une assez jolie figure ; rien de tout cela ne m’appartient, et j’avais la mauvaise foi de tout garder… hélas ! qui sait ! j’aurais peut-être fait pis. Une de mes amies me remit en mourant à Naples, il y a deux ans, et cette fille et cet argent, en me faisant jurer de remettre l’un et l’autre au duc de Spinosa, à Milan,