Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 3, 1797.djvu/67

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m’assurer que Dieu est bon, moi je dis qu’il est juste ; et la vraie justice ne s’accorda jamais avec la bonté, qui, prise dans sa véritable acception, n’est qu’un des effets de la faiblesse et de la bêtise. Vous avez cruellement outragé votre Créateur, madame ; la réparation est au-dessous de vos fautes ; et je ne saurais vous dissimuler qu’il n’est pas en mon pouvoir de vous garantir des équitables châtimens que vous méritez ; je ne puis qu’implorer l’Éternel pour le repos de votre ame. Je le ferai sans doute ; mais, faible et chétive créature comme vous, puis-je me flatter de réussir ? Les peines que vous avez à craindre sont épouvantables : éternellement brûlée dans les foyers de l’enfer est, je le sens, une peine horrible, que l’imagination n’entrevoit qu’en frémissant ; tel est pourtant votre sort, et je ne vois aucun moyen de vous en préserver. Ici, je l’avoue, le désordre de mes sens, proportionné à celui que j’occasionnais dans ma bigotte, se trouvait au-dessus de toute expression ; je bandais à rompre ma culotte ; il y eut un moment même où je ne pus m’empêcher de me branler. — Oh ! mon père, dit alors la bénigne créature, sans s’appercevoir de mes mouvemens, me donnerez-vous au