Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 6, 1797.djvu/111

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la vertu, l’innocence, la candeur, l’infortune, rien, de tout cela ne doit donc servir d’abri à l’objet que nous convoitons ; au contraire, la beauté nous excite mieux, l’innocence, la vertu et la candeur embellissent l’objet, l’infortune nous le donne… nous l’assouplit ; toutes ces qualités ne doivent donc servir qu’à nous enflammer mieux, et toutes ne doivent être regardées par nous, que comme des véhicules à nos passions. Il y a d’ailleurs ici un frein de plus à rompre ; il y a l’espèce de plaisir que donne le sacrilège ou la profanation des objets offerts à notre culte ; cette belle fille est un objet d’hommage pour les sots ; en la rendant celui de mes plus vives et de mes plus dures passions, j’éprouve la double jouissance de sacrifier à cette passion, et un bel objet, et un objet digne du culte public : faut-il s’arrêter plus long-tems à cette pensée, pour en éprouver le délire ; mais on n’a pas perpétuellement sous sa main de tels objets ; cependant on s’est accoutumé à jouir par la tyrannie, et l’on voudrait jouir tous les jours : eh bien ! il faut savoir se dédommager par d’autres petits plaisirs ; la dureté d’ame envers le malheureux, le refus de les