Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 6, 1797.djvu/169

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aller souper à sa petite maison, où nous passâmes la nuit avec deux autres jolies personnes : nous y exécutâmes toutes les extravagances qui vinrent dans la tête de ce profès en lubricité.

Ce fut à quelques tems de là, qu’échauffée par tout ce que je voyais… par tout ce que j’entendais, il me devint impossible de tenir à l’extrême besoin que j’avais de commettre un crime pour mon propre compte ; j’étais bien aise, d’ailleurs, de voir si je pouvais réellement faire quelque fond sur l’impunité qui m’était promise. Je me décidai donc à des horreurs dignes des leçons que je recevais chaque jour. Voulant éprouver à-la-fois mon courage et ma férocité, je m’habille en homme, et je vais seule, deux pistolets dans mes poches, attendre, dans une rue détournée, le premier passant qui tombera sous ma main, dans la seule vue de le voler et de l’égorger pour mon plaisir. Appuyée contre le mur, j’étais dans cet espèce de trouble, causée par les grandes passions, et dont le choc sur nos esprits animaux est nécessairement le principe de la première volupté du crime… j’écoutais… Chaque bruit nourrissait mon espoir, J’imaginais, au plus