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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 6, 1797.djvu/328

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loix n’ont point de prise, les hommes n’en sont-ils pas bien plus efficacement détournés, par les motifs de santé, de décence, de réputation, et par d’autres considérations temporelles et présentes qu’ils ont sous les yeux, que par la crainte des malheurs futurs et sans fin, qui rarement se présentent à leur esprit, ou qui n’y viennent jamais que comme vagues, incertaines et faciles à éviter.

Pour juger si la crainte des châtimens éternels et rigoureux de l’autre monde est plus propre à détourner les hommes du mal, que celle des châtimens temporels et présens du monde actuel, admettons pour un moment que la première de ces craintes subsistant universellement, la dernière fût entièrement écartée ; dans cette hypothèse, l’univers ne serait-il pas aussitôt inondé de crimes ? Admettons le contraire, supposons que la crainte des châtimens éternels fût anéantie, tandis que celle des châtimens visibles demeurerait dans toute sa rigueur ; et tandis que l’on verrait ces châtimens s’exécuter immanquablement et universellement, ne reconnaîtrait-on pas pour lors, que ces derniers agiraient avec bien plus de