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dans la privation de la vue de Dieu ; en ce cas l’enfer commence déjà dans ce monde. Car nous n’y voyons point ce Dieu dont il s’agit ; nous n’en sommes pourtant pas très-affligés ; et si vraiment ce Dieu bisarre existait, comme on nous le dépeint, ne doutons pas que ce ne fut à le voir que l’enfer consisterait alors pour les hommes.

Toutes ces incertitudes et le peu d’accord qui subsiste entre les théologiens, nous font voir qu’ils errent dans les ténèbres, et que comme les gens ivres, ils ne peuvent trouver de point d’appui ; et n’est-il pas néanmoins bien surprenant qu’ils ne puissent s’accorder sur un dogme aussi essentiel, et qu’ils trouvent, disent-ils, si clairement expliqué dans la parole de Dieu.

Convenez donc, canaille tonsurée, que ce dogme si redoutable est destitué de fondement, qu’il est le produit de votre avarice, de votre ambition, et l’enfant des égaremens de votre esprit, qu’il n’a pour point d’appui que les craintes du vulgaire imbécille, à qui vous enseignez à recevoir, sans examen, tout ce qu’il vous plaît de lui dire ; reconnaissez donc enfin que cet enfer n’existe que dans votre cerveau, et que les tourmens que