Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 8, 1797.djvu/229

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comble ; la vieille dame s’amusa de moi, elle s’amusa devant moi ; je fis, à mon tour, et d’elle et des quatre filles, tout ce qui me passa par la tête : la duègne se plaisait à m’étonner, à me surprendre, à me scandaliser par les épisodes les plus inconcevables et les plus lubriques. On eût dit que ses plus grands charmes eussent consisté à m’offrir la luxure dans ses tableaux les plus sales et les plus bisarres, afin de mieux gâter mon esprit et de mieux corrompre mon cœur. Enfin le jour parut, la marquise vint me reprendre, et nous regagnâmes promptement nos palais toutes les deux, dans la plus grande appréhension que nos maris qui nous croyaient au bal, ne vinssent à s’appercevoir de la tromperie : ils ne s’en doutèrent pas. Encouragée par ces premiers succès, je me laissai conduire encore dans cette affreuse maison ; séduite par la pernicieuse marquise, je ne tardai pas de me livrer aux hommes, et mon désordre fut au comble, Des remords s’emparèrent enfin de mon ame ; la vertu me rappela dans son sein ; je fis le serment d’être sage, et je le serais encore sans toi, dont les grâces et les attraits touchans feront toujours rompre aux pieds des