Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 8, 1797.djvu/245

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de ce malade, le médecin fait-il un grand mai en acceptant ? Non, sans doute, me dit mon jeune Esculape, non certainement, s’il est bien payé, et la discrétion certaine du mort doit l’engager à en avoir une égale, vis-à-vis de ceux qui le font agir. À quoi lui servirait de trahir son complice, puisqu’il est sûr de ne jamais l’être ? Se refuser à cette action serait une duperie de la part du médecin, car il n’oserait jamais se vanter d’une proposition qui ne le suppose pas honnête homme ; ainsi il ne retirerait de son désintéressement qu’une jouissance isolée et intellectuelle, très-inférieure à celle que lui procurerait la somme offerte. Se vanta-t-il même de rejeter la proposition, il n’en recevrait aucun éloge ; on dirait qu’il a fait son devoir, et comme il n’y a jamais de récompense pour ceux qui le font, il est parfaitement inutile de se gêner pour y prétendre : en comparant à part lui, ce qu’il doit retirer de l’acceptation ou du refus, il verra que le refus, où mettra sa bonne action dans un oubli éternel, et par conséquent il en enlèvera toute la jouissance, ou la fera éclater, mais alors en perdant son complice (or que gagne-t-il à