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l’anéantissement qu’elle veut, et il est hors de nous de mettre à nos meurtres toute l’extension qu’elle y desire.

O Juliette ! ne perdez jamais de vue qu’il n’y a point de destruction réelle ; que la mort elle-même n’en est point une, qu’elle n’est physiquement et philosophiquement vue, qu’une différente modification de la matière, dans laquelle le principe actif, ou si l’on veut, le principe du mouvement ne cesse jamais d’agir, quoique d’une manière moins apparente. La naissance de l’homme n’est donc pas plus le commencement de son existence, que la mort n’en est la cessation ; et la mère qui l’enfante ne lui donne pas plus la vie, que le meurtrier qui le tue, ne lui donne la mort ; l’une produit une espèce de matière organisée dans tel sens : l’autre, donne occasion à la renaissance d’une matière différente, et tous deux créent.

Rien ne naît, rien ne périt essentiellement ; tout n’est qu’action et réaction de la matière ; ce sont les flots de la mer qui s’élèvent et s’abaissent à tout instant, sans qu’il y ait ni perte ni augmentation dans la masse de ses eaux ; c’est un mouvement perpétuel qui a été, et qui sera toujours, et