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bientôt mon secret ; mes héritiers chicaneraient ce don, il serait perdu pour ma fille. Je m’en fie à toi, ma chère Juliette, jure-moi de protéger à-la-fois mes horreurs et mes bonnes actions. Il y a dans ce porte-feuille cinquante mille francs de plus qu’il ne faut, que je te supplie d’accepter. Eh bien ! jure-tu de servir en même-tems de bourreau aux deux êtres que je viens de condamner, et de protectrice à la charmante créature que je t’abandonne. Oh mon amie, tu vois ma confiance ; tu m’as dit cent fois que les rouées ne se nuisaient pas entr’elles ; démentiras-tu cette maxime ! Je ne le crains pas… Mon amour, j’attends ta réponse.

Infiniment plus sûre de tenir parole à la comtesse, en lui promettant de la servir dans un crime que dans l’accomplissement d’une bonne œuvre, et sachant déjà à quoi m’en tenir sur l’une et l’autre des propositions quelle me faisait, je promis néanmoins toutes les deux. Chère amie, dis-je à la comtesse, en l’embrassant, votre volonté sera remplie, soyez sûre qu’avant un an, votre chère Fontange jouira du sort que vous lui destinez ; mais dans ce moment-ci, mon amour, ne nous occupons, je vous