Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 9, 1797.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

présent… Madame, me dit Elise, je ne sais quel espoir parle au fond de mon cœur, mais vos principes me tranquillisent : il est, m’avez-vous dit, dans les loix éternelles de la nature, que le crime triomphe, et que la vertu soit humiliée ; j’attends tout de cet immuable décret… ah ! ma chère maitresse, il nous sauvera la vie. Mon raisonnement, sur cela, va vous paraître simple, dis-je à mes amies, si, comme nous ne pouvons en douter, la masse des crimes l’emporte, par son poids, sur celle de la vertu, et ceux qui la pratiquent : l’égoïsme dans l’homme n’est que le résultat de ses passions, presque toutes portent au crime ; or, l’intérêt du crime est d’humilier la vertu ; donc dans presque toutes les données de la vie, je parierai toujours plutôt pour le crime que pour la vertu. Mais, madame, dit Raimonde, vis-à-vis de ces gens-ci, nous sommes la vertu, eux seuls représentent le vice ; donc ils nous écraseront. Nous parlons de données générales, répondis-je, et ceci n’est qu’un cas particulier : en faveur d’une seule exception, la nature ne s’écartera pas de ses principes.

Nous raisonnions de cette manière, lors-