Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 9, 1797.djvu/340

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ses mains, ne sert qu’à forger les armes dont elle détruit les gouvernemens, et qu’elle n’emploie jamais que dans cette intention ; athéisez et démoralisez sans cesse le peuple que vous voulez subjuguer ; tant qu’il n’adorera d’autres dieux que vous, qu’il n’aura d’autres mœurs que les vôtres, vous en serez toujours le souverain. Un homme sans mœurs est dangereux, dit Ferdinand. — Oui, quand il a quelqu’autorité, parce qu’il sent alors le besoin d’en abuser, jamais quand il est esclave. Qu’importe qu’un homme croie ou non qu’il y ait du mal à me tuer, lorsque je l’entraverai au point de lui en ôter tous les moyens ; et quand la dépravation de ses mœurs l’amollira, il rampera bien mieux encore sous les fers dont je l’accablerai. Mais, dit Charlotte, comment s’amollira-t-il sous le joug ? Ce n’est guères, ce me semble, qu’au milieu du luxe et de l’aisance, que l’homme se démoralise. Il se démoralise au sein du crime, répondit le prince. Or, laissez-lui réciproquement sur lui-même la faculté criminelle la plus étendue ; ne le punissez jamais que quand ses dards se dirigent sur vous ; deux excellens effets résulteront de ce plan : l’immoralité qui vous est nécessaire,