Page:Sade - Les 120 Journées de Sodome, éd. Dühren, 1904.djvu/118

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

toutes les deux nous quittâmes le couvent, moi avec presque la résolution de n’y plus revenir ; le ton de Geoffroi avait humilié mon petit amour propre et sans approfondir d’où venait le dégoût je n’en aimais ni les suites ni les conséquences. Il était pourtant écrit dans ma destinée que j’aurais encore quelque aventure dans ce couvent, et l’exemple de ma sœur, qui avait eu, m’avait-elle dit, affaire à plus de quatorze, devait me convaincre que je n’étais pas au bout de mes caravanes ; [4]je m’en aperçus trois mois après cette dernière avanture aux sollicitations que me fit un de ces bons révérends, homme d’environs 60 ans, il n’y eut sorte de ruse qu’il n’inventa pour me déterminer à venir dans sa chambre, une réussit si bien, que je m’y trouvais un beau dimanche-matin sans savoir ni comment ni pourquoi. Le vieux paillard, que l’on nommait père Henri, m’y renferma avec lui aussitôt qu’il me vit entrer, et m’embrassa de tout son cœur : „Ah, petite friponne,“ s’écria-t-il au transport de sa joie, „je te tiens donc, tu ne m’échapperas pas le coup-ci.“ Il faisait très froid, mon petit nez était plein de morve comme c’est assez l’usage des enfants, je voulus me moucher. „Eh, non, non,“ dit Henri en s’y opposant, „c’est moi, c’est moi qui vais faire cette opération-là, ma petite.“ Et m’ayant couchée sur son lit, la tête un peu penchée il s’assit auprès de moi, attirait ma tête renversée sur ses genoux, — on eût dit qu’en cet état il dévorait des yeux cette sécrétion de mon Cerveau. „Oh, la jolie petite morveuse,“ disait-il en se pâmant, „comme je vais la sucer !“ — se courbant alors sur ma tête, il mettait mon nez tout entier dans sa bouche, non seulement il dévora toute cette morve