Page:Sade - Les 120 Journées de Sodome, éd. Dühren, 1904.djvu/35

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on avait mis sa vie, mais le scélérat trouvait même encore un délice bien plus piquant à se faire donner ce qu’il voulait sans être obligé de rien tenir, il s’était offert sur cela des épisodes de scélératesse à son esprit dont il sentait accroître sa perfide lubricité, et voilà comme il s’y prit pour mettre à la scène toute l’infamie et tout le piquant qu’il y put. Son hôtel se trouvait en face d’un endroit l’on exécuta quelquefois des criminels à Paris et comme le délit s’était commis dans ce quartier-là, il obtint que l’exécution serait faite sur cette place en question, à l’heure indiquée, il fit trouver chez lui la femme et la fille de ce malheureux, tout était bien fermé du côté de la place de manière qu’on ne voyait des appartements, où il tenait ses victimes, rien des trains qui pouvaient s’y passer, le scélérat qui savait l’heure positive de l’exécution prit ce moment là pour dépuceler la petite fille dans les bras de sa mère et tout fut arrangé avec tant d’adresse et d’une précision que le scélérat déchargeait dans le cul de la fille au moment où le père expirait. Dès que son affaire fut faite, venez voir dit-il à ses deux princesses, en ouvrant une fenêtre sur la place, venez voir comment je vous ai tenu parole et les malheureuses virent l’une son père, l’autre son mari expirant sous le fer du bourreau. Toutes deux tombèrent évanouies, mais Curval avait tout prévu. Cet évanouissement était leur agonie, elles étaient toutes deux empoisonnées et elles ne rouvrirent jamais les yeux. Quelque précaution qu’il prit pour envelopper toute cette action des ombres du plus profond mystère, il en transpira néanmoins quelque chose, on ignora la mort des femmes, mais on la supposa vivement des