Page:Sade - Les Crimes de l’amour, 1881.djvu/31

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toujours prêts à verser notre sang pour elle, quand elle ne verra plus dans nous que des frères, nous n’offrirons plus à ses yeux que des enfants et des soldats[1].

Ce discours, prononcé d’une voix ferme et d’un maintien assuré, soutenu des grâces nobles de cette fille intéressante, acheva d’enflammer le duc ; mais cherchant à déguiser son trouble sous les apparences d’une rigidité feinte :

— Savez-vous, dit-il à Juliette, que vos discours, votre conduite… mon devoir en un mot, me contraindraient de vous envoyer à la mort ? Oubliez-vous, impérieuse créature, qu’il ne tient qu’à moi de sévir ?

— Avec la même facilité, monsieur le duc, qu’il ne tient qu’à moi de vous mépriser, si vous abusez de la confiance que vous m’avez inspirée par votre lettre à mon père.

— Il n’y a point de serment sacré avec ceux que l’église réprouve.

— Et vous voulez que nous embrassions

  1. Voilà comme germaient déjà dans ces âmes fières les premières semences de la liberté.