Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 1, 1799.djvu/114

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Juliette, que l’idée d’en être adoré te console, et sois sûr que qui que ce soit dans l’univers n’acquerra sur son cœur, des droits… qui ne peuvent appartenir qu’à toi seul.

Mademoiselle de Castelnau ne tarda point à profiter de la permission qu’elle avait obtenue de voir son père ; elle vole à la prison. Le baron n’était point prévenu ; cette surprise pensa lui coûter la vie ; il fut quelques instans sans connaissance dans les bras de Juliette. Ô ! chère fille, s’écria-t-il, dès que ses yeux furent r’ouverts au jour, je craignais bien que les barbares ne me traînassent à l’échafaud sans qu’il me fût possible de t’embrasser pour la dernière fois. Vous ne mourrez point, mon père, répondit Juliette ; je suis la maîtresse de vos jours ; un mot de moi peut vous les conserver. — Un mot ! que veux-tu dire ?… Si ce mot te coûtait l’honneur, Juliette, je ne voudrais point d’une vie payée de ton opprobre. — Ô ! mon père, ce n’est pourtant qu’à ces conditions que je puis vous arracher des mains de nos ennemis…