Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 1, 1799.djvu/165

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croyez aux sentimens que je vous jure, animés par ces regards charmans où j’en puise l’ardeur, peuvent-ils avoir d’autres bornes que ma vie ? — Ces propos sont ceux que vous tenez à toutes les femmes ; croyez-vous que je n’en connaisse pas le jargon ? il s’agit bien de dire ce qu’on pense avec elles ; le sentiment et l’art de séduire sont deux choses bien différentes ; et à quoi bon les frais du premier, quand vous réussissez par le second ? — Non, Dolsé, non, vous ne devez pas savoir comme on trompe, il est impossible que jamais on vous l’ait appris ; l’amant assez froid pour mettre en systême l’art de séduire, n’oserait tomber à vos genoux ; un rayon de vos yeux enchanteurs en détruisant ses projets de victoire, n’en ferait incessamment qu’un esclave, et le dieu qu’il aurait bravé, l’enchaînerait bientôt à son culte. Un son de voix si flatteur, tant d’élégance dans la parure, tant de moyens de plaire en un mot, soutenaient si bien ces discours, les animaient tellement, leur prêtaient une si vive énergie, que l’âme sensible de la