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Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/18

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des ravins de six cents toises de profondeurs, au fond desquels coulaient diverses branches du fleuve de feu, dont il paraissait qu’était là la source. Rodrigue considère un instant cet effrayant passage, il voit quelle est sa mort, s’il vient à se précipiter ; rien ne peut assurer sa marche, rien ne s’offre pour le retenir. Après les dangers que j’ai déjà franchis, pense-t-il, je serais bien lâche de n’oser poursuivre… avançons ; mais à peine est-il à cent pas, que sa tête se trouble ; au lieu de fermer les yeux sur les périls qui l’environnent, il les contemple avec effroi… l’équilibre se perd, et le malheureux prince tombe dans les gouffres qui sont à ses pieds… Après quelques minutes d’évanouissement, il se relève, il ne conçoit pas comment il peut exister, il lui paraît pourtant que sa chûte a été si douce et si heureuse, qu’elle ne peut être l’effet que d’une puissance magique. Cela pourrait-il être autrement, puisqu’il respire encore ? il reprend ses sens, et le premier objet qui le frappe dans l’affreux vallon où il se trouve transporté, est une