Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/235

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dans une heure, Herman sera mort, sans que vous en soyez moins déshonorée… songez que vos refus perdent votre amant, sans sauver votre pudeur, et que le sacrifice de cette pudeur, dont l’estime est imaginaire, redonne la vie à celui qui vous est précieux… que dis-je, le rend dans vos bras à l’instant… Fille crédule et faussement vertueuse, tu ne peux balancer sans une faiblesse condamnable… tu ne le peux sans un crime certain ; en accordant, tu ne perds qu’un bien illusoire… en refusant, tu sacrifies un homme, et cet homme immolé par toi, c’est celui qui t’est le plus cher au monde… Détermine-toi, Ernestine, détermine-toi, je ne te donne plus que cinq minutes. — Ernestine : toutes mes réflexions sont faites, monsieur ; jamais il n’est permis de commettre un crime pour en empêcher un autre. Je connais assez mon amant pour être certaine qu’il ne voudrait pas jouir d’une vie qui m’aurait coûté l’honneur, à plus forte raison ne l’épouserait-il pas après ma flétrissure ; je me serais donc rendue coupable, sans qu’il en devînt plus heu-