Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/27

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parcourt est ombragé des arbres fruitiers les plus agréables ; l’orange, le muscat, la figue, la pêche, la noix de cocos, l’ananas, pendent indistinctement à ses yeux, et lui présentent à l’envie, leur fraîche nourriture ; le monarque en profite, et jouit pendant ce tems des concerts délicieux de mille oiseaux divers qui voltigent sur les branches de ces arbres richement chargés. Mais comme le peu de plaisirs qui lui étaient encore réservés, devaient être mêlés de peines cruelles, et qu’il ne lui arrivait nulle chose qui ne fût l’image de sa vie, rien ne pouvait exprimer la vîtesse de la barque qui lui faisait parcourir ces bords divins. Plus elle avançait et plus sa rapidité s’augmentait. Bientôt des cataractes d’une hauteur prodigieuse se montrent à Rodrigue, il reconnaît la cause de la rapidité de sa marche ; il voit, que frêle jouet du torrent qui l’entraîne, il va tomber dans le plus effrayant abîme ; à peine a-t-il le tems de la réflexion, que sa barque emportée à plus de cinq cents toises de profondeur, se trouve