trouve chaque matin une incroyable quantité
d’enfans abandonnés dans les rues, un tombereau
les enlève à la pointe du jour, et on les jette
dans une fosse ; souvent, les accoucheuses elles-mêmes
en débarrassent les mères, en étouffant
aussi-tôt leurs fruits dans des cuves d’eau bouillante,
ou les jetant dans la rivière ; à Pékin, on
les met dans de petites corbeilles de joncs que
l’on abandonne sur les canaux, on écume chaque
jour ces canaux, et le célèbre voyageur du
Halde évalue à plus de trente mille le nombre
journalier qui s’enlève à chaque recherche ; on ne
peut nier qu’il ne soit extraordinairement nécessaire,
extrêmement politique de mettre une
digue à la population dans un gouvernement républicain ;
par des vues absolument contraires, il
faut l’encourager dans une monarchie ; là les
tyrans n’étant riches qu’en raison du nombre de
leurs esclaves, assurément il leur faut des hommes ;
mais l’abondance de cette population, n’en
doutons pas, est un vice réel dans un gouvernement
républicain ; il ne faut pourtant pas l’égorger
pour l’amoindrir, comme le disoient nos
modernes décemvirs, il ne s’agit que de ne pas
lui laisser les moyens de s’étendre au-delà des
bornes que sa félicité lui prescrit. Gardez-vous de
Page:Sade - Philosophie dans le boudoir, Tome 2, 1795.djvu/158
Apparence
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
152