Tout cela, ma chère Eugénie, est absolument
fondé sur des principes que je vous ai déjà développés.
Que desire-t-on quand on jouit ? que
tout ce qui nous entoure ne s’occupe que de
nous, ne pense qu’à nous, ne soigne que nous ;
si les objets qui nous servent jouissent, les voilà
dès-lors bien plus sûrement occupés d’eux que de
nous, et notre jouissance conséquemment dérangée ;
il n’est point d’homme qui ne veuille être
despote quand il bande, il semble qu’il a moins
de plaisir si les autres paroissent en prendre
autant que lui ; par un mouvement d’orgueil bien
naturel en ce moment, il voudroit être le seul
au monde qui fût susceptible d’éprouver ce qu’ils
sentent ; l’idée de voir un autre jouir comme lui le
ramène à une sorte d’égalité qui nuit aux attraits
indiscibles que fait éprouver le despotisme
alors[1] ; il est faux d’ailleurs qu’il y ait du
- ↑ La pauvreté de la langue française nous contraint à employer des mots que notre heureux gouvernement réprouve aujourd’hui avec tant de raison ; nous espérons que nos lecteurs éclairés nous entendront, et ne confondront point l’absurde despotisme politique, avec le très luxurieux despotisme des passions de libertinage.